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Cas d’égalité
Quel langage ?
Article mis en ligne le 7 avril 2024

par Pierre Dolain

Cas d’égalité des triangles et langage associé

Ayant eu à aider en mathématique une élève de 4e, appelons-la Jeanne par commodité, j’ai été amené à voir le texte de leçon fourni par le professeur de la classe. Et à observer comment ce texte a été interprété par Jeanne.

Cette leçon concernait les « cas d’égalité des triangles ».

Tout d’abord le point sur le vocabulaire. Le mot « égaux » signifie dans ce contexte « isométriques », à partir du moment où on sait bien qu’il est employé comme tel, ce n’est plus la peine de chipoter. Pas de problème pour Jeanne (Fi des puristes intempestifs, pour moi le langage doit s’adapter au contexte humain).

La définition que je trouve dans le cours fourni par son professeur est :

Définition : Des triangles égaux sont des triangles superposables. Ils ont des côtés deux à deux de même longueur et des angles deux à deux de même mesure.

Il m’apparait que la première phrase n’est pas une définition. C’est juste une description d’une manipulation physique (d’ailleurs imprécise ; superposable par glissements ou par découpage puis retournement ?) mais qui n’est pas opérationnelle pour une démonstration. À moins de dire explicitement que « superposable » est synonyme de « Ils ont des côtés deux à deux de même longueur et des angles deux à deux de même mesure. » (mais alors pléonasme). Quel besoin de « superposable » dans ce cas ? L’utilisation de ce mot semble aller à l’encontre du but recherché : faire comprendre ce qu’est une démonstration et ce qui n’en est pas une.

Arrivaient ensuite sur la feuille les phrases suivantes :

Propriété 1 : Si deux triangles ont un côté de même longueur et des angles adjacents à ce côté deux à deux de même mesure alors ces deux triangles sont égaux.
 
Propriété 2 : Si deux triangles ont un angle de même mesure compris entre des côtés deux à deux de même longueur, alors ces deux triangles sont égaux.
 
Propriété 3 : Si deux triangles ont leurs côtés deux à deux de même longueur, alors ces deux triangles sont égaux.

Jeanne, persuadée qu’en contrôle, interrogée sur la leçon, on lui demandera de reproduire exactement les phrases en rouge, tentait sans succès de les apprendre par cœur sans recourir en même temps à un dessin (en essayant sans les avoir sous les yeux de les reproduire moi-même, j’ai pris conscience de la difficulté). Cependant, en faisant des dessins et s’y référant, elle manipulait alors correctement les « cas d’égalité ».

Je vous propose des interprétations des phrases en rouge montrant la difficulté de formuler cela correctement.

Si deux triangles ont un côté de même longueur : « un côté de même longueur »… cela n’est pas clair ; on pourrait dire « ont chacun un côté, les deux de même longueur. Et chacun des angles adjacents à ces côtés respectivement de même mesure dans l’un et l’autre triangle ».

Je ne cache pas que j’en ai bavé pour trouver cette formulation et ne suis pas vraiment sûr qu’elle n’est pas ambiguë. Seule la formulation de la propriété 3 me semble simple et efficace et facile à retenir.

Je dois préciser que chacune des propriétés était illustrée par un dessin clair et je pense facile à retenir.

Finalement pourquoi écris-je tout ça au risque de passer pour un capillitracteur ?

Il me semble que le fait de vouloir faire tout verbaliser et à tout prix par les élèves est fortement contreproductif.

En ce qui concerne Jeanne, j’ai pu voir que, finalement, elle avait bien compris ce qu’étaient les cas d’égalité des triangles et saurait rapidement utiliser cela pour résoudre des problèmes. C’est simplement dommage qu’elle ait perdu du temps à essayer de retenir des phrases par cœur, se soit énervée et en était limite découragée.

Pour revenir à la définition des triangles égaux en classe de 4e, le mieux serait (à mon avis) de prendre l’une des trois propriétés et de dire que les deux autres sont équivalentes. Je ne sais pas si à ce stade une démonstration est pertinente ; personnellement je choisirais comme définition la propriété 3.

Nos collègues des groupes Géométrie et Léo de l’IREM de Paris sauront sûrement nous éclairer quant à la formulation des propriétés par les élèves.

 

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Les chantiers de pédagogie mathématique n°200 avril 2024
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