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Oui ou Non
Article mis en ligne le 16 décembre 2013
dernière modification le 27 décembre 2020

par Alain Bougeard

Réponse à la Question n°7

QUESTION n°7 (n°158 de septembre 2013)

Existe-t-il un entier $n \gt 1$ tel que $S_n = 1 + \dfrac{1}{2} + \cdots + \dfrac{1}{n}$ soit un nombre entier ?

Pas de réponse à cette question 7. Peut-être est-ce trop difficile si l’on n’est pas un familier de la suite harmonique ? Ou au contraire trop classique pour un exercice dont on peut trouver la solution dans tous les manuels spécialisés ou sur internet donc peut-être jugé sans intérêt ? Ou tout simplement par manque de temps pour rédiger la solution sur internet (c’est pourquoi nous proposons une autre méthode pour répondre en envoyant directement un email avec éventuellement une pièce jointe).

Comme toujours ce qui m’intéresse est : comment aborder la question ?

  • Directement : Réduire au même dénominateur $D$ ($n !$ ou dénominateur simplifié ?) et démontrer que le numérateur est (ou n’est pas) un multiple de $D$ ? Pas d’angle d’attaque à première vue…
  • Expérimentalement : Examiner les premiers termes en espérant trouver une idée ? Ça je sais faire…
$i$ 1 2 3 4 5 6 7
$S_i$ 1 $\dfrac{3}{2}$ $\dfrac{11}{6}$ $\dfrac{25}{12}$ $\dfrac{137}{60}$ $\dfrac{49}{20}$ $\dfrac{263}{140}$

Mais c’est bien sûr !... :

Hormis $S_1$, il semblerait bien que tous ces termes se présentent comme des fractions d’un nombre impair par un nombre pair ce qui, si cette hypothèse était juste, réduirait à zéro toute chance d’obtenir un nombre entier !

L’hypothèse $\mathcal{P}(n) : S_n = \dfrac{I_n}{P_n}$ avec $I_n$ entier impair et $P_n$ entier pair, dépendant de $n$ ; il ne semble pas absurde de penser à la démontrer par récurrence. $\mathcal{P}(2)$ étant vraie et en supposant $\mathcal{P}(i)$ vraie pour $i$ compris entre $2$ et $n$, il reste à démontrer que $\mathcal{P}(n+1)$ est vraie.

$S_{n+1} = S_n + \dfrac{1}{n+1} = \dfrac{I_n}{P_n} + \dfrac{1}{n+1} = \dfrac{I_n(n+1) + P_n}{P_n(n+1)}$ ne pose aucun problème pour $n$ pair car le numérateur est visiblement impair et de dénominateur pair donc il ne reste plus à traiter que le cas où $n$ est impair c’est-à-dire $n = 2m -1$ avec $m \gt 1$.

$S_{n+1} = S_{2m} = 1 + \dfrac{1}{2} + \dfrac{1}{3} + \dfrac{1}{4} + \cdots + \dfrac{1}{2m}$

$ \qquad \qquad \quad = \left( \dfrac{1}{2} + \dfrac{1}{4} + \dfrac{1}{6} + \cdots + \dfrac{1}{2m} \right) + \left( 1 + \dfrac{1}{3} + \dfrac{1}{5} + \cdots + \dfrac{1}{2m-1} \right)$

$ \qquad \qquad \quad = \dfrac{1}{2} S_m + \dfrac{A_m}{I’_m}$
$A_m$ est un entier (pair ou impair) et $ I’_m$ est un entier impair comme produit de nombres impairs.

D’après l’hypothèse de récurrence

$ S_{n+1} = \dfrac{I_m}{2P_m} + \dfrac{A_m}{I’_m} = \dfrac{I’_mI_m + 2P_mA_m}{2P_mI’_m} = \dfrac{I’’_m}{P’’_m}$
par un calcul élémentaire sur le pair et l’impair.

Donc finalement $\mathcal{P}(n+1)$ est vraie et cela prouve qu’il n’existe aucun $n \gt 1$ tel que $S_n$ soit un entier.

Il existe même un résultat plus fort affirmant que toute « tranche » de la série harmonique (sauf réduite à 1 bien sûr) ne peut être un nombre entier, résultat connu sous le nom de théorème de Kürschak et dont vous pourrez trouver une démonstration « enlevée » en quelques lignes dans Wikipédia.

Je ne sais pas vous, mais moi je n’ai rien compris à cette démonstration qui pourtant constituerait la démonstration directe recherchée mais non abordée de la question n° 7.

Si je suis bien d’accord avec l’auteur sur l’existence d’un unique nombre $r$ tel que $2^r$ soit la plus grande puissance de 2 divisant au moins un entier de $[m,n]$ (pour éviter de parler de valuation dyadique) par contre la conclusion qu’il en déduit immédiatement me laisse pantois :

On en conclut que $\displaystyle \sum _{i=m}^{n}\frac {1}{i}$ s’écrit sous la forme $ \dfrac{A}{2^rB}$, où${A}$ et ${B}$ sont impairs…

Quel raccourci !

Ne devrait-on pas commencer par réduire la somme ci-dessus (appelé $S_{m,n}$) au même dénominateur sous forme de $\dfrac{N}{D}$.

Si nous appelons $p$ l’unique entier appartenant à $[m,n]$ et divisible par $2^r$ (donc $p = 2^r.k$ avec $k$ impair par définition de $r$) alors

$S_{m,n} = \dfrac{N}{D} = \dfrac{1}{m} + \dfrac{1}{m+1} + \cdots + \dfrac{1}{p} + \cdots + \dfrac{1}{n} = \dfrac{q_m+q_{m+1} + \cdots + q_k + \cdots + q_n}{D}$

En choisissant pour $D$ le PPCM de $\{m, m+1, …, p, …, n\}$ nous avons alors $D = 2^r.k.q_r$ avec $q_r$ impair toujours d’après la définition de $r$. Remarquons au passage que $D$ est pair.

Pour $i \neq r$, $q_i = \dfrac{D}{i}$ donc $q_i$ est pair toujours d’après la définition de $r$.

Alors $N$, somme de nombres pairs et d’un nombre impair ($q_r$), est donc un nombre impair et maintenant nous pouvons conclure.

 

Question en suspens…

Par contre concernant la série harmonique il traîne toujours dans le sac de mes questions non résolues :

Quelle est la valeur exacte du plus petit entier $n$ tel que $S_n \gt 1{\,}000$ ?

Si vous avez des idées (mathématiques ou informatiques)…

 

Question n°8

En attendant revenons à la géométrie avec cette petite douceur de Noël :

Question n°8 :

Existe-t-il des triangles rectangles à côtés entiers dont l’aire et le périmètre sont mesurés par le même nombre…


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Les chantiers de pédagogie mathématique n°159 décembre 2013
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