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La numération et le chiffre du silence en AP
Article mis en ligne le 29 juin 2018
dernière modification le 26 décembre 2020

par Michel Suquet

Prolégomènes abrégés

À l’entrée en 6e, un certain nombre d’élèves ont des difficultés pour écrire des grands nombres, tels que 1 070 005 par exemple, lorsqu’ils leur sont dictés.

Une explication popularisée par Stella Baruk dans son livre « Comptes pour petits et grands Éd. Magnard » est dans la différence entre ce que l’on entend et ce que l’on écrit. Je me suis inspiré des idées proposées dans le tome 1 de ce livre pour proposer à mes élèves deux séances d’accompagnement personnalisé (ou AP [1]) pour remédier à ces difficultés.

Le but de ces séances est de leurs donner des outils pour analyser, et comprendre, correctement la structure orale et écrite de la numération décimale des nombres entiers. C’est aussi en partant d’un autre point de vue que les élèves en difficulté peuvent prendre conscience de la structure de l’écriture chiffrée des nombres qui est en fait comme un tableau dont on a effacé les légendes (et le quadrillage…) pour gagner en rapidité d’écriture et de lecture.

Le réseau Canopé propose un webdocumentaire à destination des professeurs des écoles qui expose en détails les idées de Stella Baruk et de leurs mises en œuvre dans les classes de l’école élémentaire. Ces différents documents, sous forme de vidéos, couvrent l’apprentissage de la numération décimale et des opérations sur les nombres entiers au cycle 2 ; cet apprentissage s’étend sur plusieurs années et les deux séances d’AP décrites ci-dessous ne seront donc pas suffisantes pour certains élèves…

 

Première séance

Dans un premier temps, on passe en revue les nombres entiers : 0, 1, 2, 3, 4, 5… Et je leur demande combien il y en a. Un peu, beaucoup… une infinité ! Occasion de chercher avec les élèves une explication à cette réponse.

Ensuite, en suivant les pas de Stella Baruk, je pars du nombre 37 et on examine comment il s’écrit (avec 2 chiffres) et comment il se dit (avec 2 mots : trente et sept, trente mot valise à expliciter). On passe ensuite plus rapidement à 36, puis à 35… jusqu’à 30 : tiens, un seul mot pour le dire ! Intervention du chiffre du silence ! Insister sur la différence entre ce que l’on dit ou ne dit pas et ce que l’on écrit ou n’écrit pas ; en effet, on écrit le chiffre 0 alors qu’on ne l’a pas entendu, et nous verrons par la suite qu’il y a des mots que l’on dit mais qui ne sont pas écrits…

Il serait intéressant à ce propos d’analyser comment d’autres langues disent/écrivent les nombres et si on retrouve des différences entre l’écriture chiffrée et l’écriture avec des mots qui sont des difficultés pour certains de nos élèves.

Une autre particularité de la numération entière : la valeur d’un chiffre dépend de sa place. Pour que les élèves prennent conscience de cela, voici un exercice dans lequel on demande comment se dit le chiffre 5 dans les nombres suivants (on a caché tous les chiffres qui ne sont pas des 5) :

$$ \underline{\phantom{}} \, \underline{\phantom{}} \, \underline{5} \, \underline{\phantom{}} \qquad \qquad \underline{\phantom{}} \, \underline{\phantom{}} \, \underline{5} \, \underline{\phantom{}} \, \underline{\phantom{}} \qquad \qquad \underline{\phantom{}} \, \underline{5} \, \underline{\phantom{}} \, \underline{\phantom{}} \, \underline{\phantom{}} \qquad \qquad \underline{\phantom{}} \, \underline{\phantom{}} \, \underline{5} \, \underline{\phantom{}} \, \underline{\phantom{}} \, \underline{\phantom{}} \, \underline{\phantom{}} $$

On a donc les mots ou parties de mots (-ante, mille, cent…) qui sont des exemples d’indices à ne pas négliger pour écrire ou comprendre le nombre qui nous est dit ou que l’on doit dire. On pourra donner à cette occasion des éléments étymologiques sur ces mots.

Remarque : certaines réponses de l’exercice ci-dessus ne sont pas évidentes ; par exemple, on aura cinq … cent ou cinquante … mille : les … étant mis pour rappeler qu’il y aura à dire éventuellement les valeurs des chiffres entre le 5 et le cent ou le mille (sauf si ces rangs sont occupés par le chiffre du silence bien entendu).

Proposons alors une dictée de nombres (tous inférieurs largement à 100 000) dans laquelle intervient progressivement le chiffre du silence :

$$ 753 \qquad \qquad 537 \qquad \qquad 282 \qquad \qquad 450 $$


$$ 307 \qquad \qquad 500 \qquad \qquad 1\,007 \qquad \qquad 10\,001 $$

À la correction, insister sur le chiffre du silence qui peut intervenir plusieurs fois pour un même nombre : ce sont les indices qui sont dits mais pas écrits qui nous permettent de les écrire correctement en chiffres.

Il est temps d’aborder de plus grands nombres. Écrire au tableau, tout attaché, le nombre suivant et demander aux élèves de le dire.

$$ 35842657 $$

Une fois qu’un élève l’a dit correctement, leurs demander ce qu’il faut rajouter pour qu’il soit plus facile à lire. Intervention des espaces. On pourra alors mentionner qu’il y a quelques siècles, les mots s’écrivaient les uns à la suite des autres sans espaces puis ensuite parfois avec un point médian pour les séparer. L’utilisation d’un espace est relativement récente (de mémoire au cours du Moyen-Âge) et a ouvert la porte à la lecture rapide et silencieuse.

Sous la dictée d’un élève, l’écrire avec des mots en repérant les indices que l’on entend mais que l’on n’écrit pas dans l’écriture chiffrée :

$$ 35\,842\,657 $$


$$ tr\underline{ente} \, cinq \, \fbox{millions} \, huit \, \underline{cent} \, quar\underline{ante} \, deux \, \fbox{mille} \, six \, \underline{cent} \, cinqu\underline{ante} \, sept $$

À noter les indices structurants (mille, millions… que l’on a encadré) qui correspondent aux espaces facilitant la lecture ; sans oublier, bien entendu, les 2 indices (-ante et cent que l’on a souligné) qui interviennent dans les groupes de 3 chiffres.

L’occasion se présentera dans d’autres exercices de parler des chiffres cachés, 1 (chiffre qui est parfois silencieux comme dans 3 137) et parfois 2 (comme dans 327), ou de l’indice -ze (dans onze, douze, treize…). Sans oublier nos fameux soixante-dix, quatre-vingt, quatre-vingt-dix…

 

Deuxième séance

Au début de cette séance, demandez aux élèves ce qu’il y a à retenir de la séance précédente pour rappeler les éléments qui permettent d’écrire correctement les nombres à l’aide des chiffres.

Pour mettre en action tous ces rappels, demandez de recopier le nombre suivant en mots, de repérer les indices qui permettent de l’écrire correctement en chiffres et enfin de l’écrire en chiffres :

$$soixante \, sept \, millions \, trente \, mille \, huit$$

Pour l’exercice suivant, demandez de recopier les nombres suivants et d’indiquer comment se dit le chiffre encadré :

$$ 55\fbox{5}\,555 \qquad \qquad 3\,\fbox{3}33\,\fbox{3}33 \qquad \qquad \fbox{1}11 $$


$$ 1\fbox{1}3\,\fbox{4}\,\fbox{4}4 \qquad \qquad 3\fbox{2}2\,2\fbox{2}2\,1\fbox{2}2 $$

Enfin, une dictée qui permet de travailler avec de plus grands nombres et la difficulté du chiffre du silence :

$$ 45\,045 \qquad \qquad 627\,000 \qquad \qquad 50\,050\,050 $$


$$ 200\,000\,040 \qquad \qquad 405\,004\,030 \qquad \qquad 7\,060\,020 $$

Pour terminer la séance, à vous d’inventer d’autres exercices pour travailler la numération décimale ; ou utiliser des exercices en ligne comme ceux de MathenPoche ou de LaboMep.

Certains élèves devraient encore avoir des difficultés (ce serait un miracle que 2 séances suffisent, non ?) : les repérer pour leurs proposer régulièrement de s’exercer lors de séances d’AP ultérieures.

 

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Les Chantiers de Pédagogie Mathématique n°177 juin 2018
La Régionale Île-de-France APMEP, 26 rue Duméril, 75013 PARIS