Le débat récent autour des initiatives prises par le ministère de l’Éducation Nationale visant à développer le goût des mathématiques, a fait resurgir la question de la place des diverses actions autour de l’enseignement institutionnel. Lors du forum des mathématiques le 22 mars à l’IHP, Michèle Artigue a présenté une enquête sur les prises en compte de ces actions dans l’enseignement dans les classes, les difficultés pour les mener à bien, et l’évaluation de leurs effets sur les élèves, en particulier sur leur réussite scolaire en mathématiques. Ces questions sont difficiles et peu étudiées jusqu’à maintenant, mais elles sont essentielles pour un enseignant qui garde à l’esprit que son objectif premier est évidemment que les apprentissages dictés par les programmes soient menés à bien. Pour ma part, j’ai souvent été gêné par cette idée que les activités périphériques seraient des récréations facilement accessibles, ludiques, portées par le plaisir, au contraire des séances en classe, irrémédiablement ennuyeuses, rébarbatives, et inutilement « abstraites ». Cette représentation oublie plusieurs éléments :
- En classe il y a bel et bien des objectifs d’apprentissage précis que l’on doit atteindre, contrainte qui ne pèse pas impérativement sur les activités périphériques.
- Parmi eux, il y a bien sûr celui de développer la capacité à chercher en prenant des initiatives, ce qui est principalement visé par les concours, olympiades, rallyes, etc., mais qui doit (ou devrait) être présent dans les activités en classe.
- Le seul fait d’être ludique n’atteste pas de l’intérêt pédagogique d’une activité. On peut admettre que c’est un facteur favorable à l’investissement de l’élève, mais pour un enseignant cela ne peut pas être le seul critère à prendre en compte.
- Le plaisir et la jubilation à faire des maths, quels qu’en soient les supports, ne se décrète pas, et nécessite plusieurs conditions, d’une part de disposer de connaissances qui permettront de pouvoir prendre des initiatives, d’autre part de se sentir suffisamment en confiance sur ses possibilités d’entreprendre et surtout d’aboutir, condition qui justement ne peut être réalisée qu’avec l’expérience de la réussite. À l’inverse, j’ai observé plusieurs fois l’effet contre-productif sur des élèves échouant dans leur recherche, de se voir balancer une super astuce qui plie le problème en deux lignes … expérience qui les renforce dans leur conviction qu’ils ne font décidément pas partie du « club ». On parle souvent du plaisir de chercher, alors qu’il s’agit surtout du plaisir de trouver !
Les situations de recherches doivent donc être judicieusement choisies, les formulations bien réfléchies, et les aides éventuelles adaptées à ce qui peut être pris en charge par le public concerné. Après des erreurs de jeunesse, les Olympiades de mathématiques, créées dans les années 2000, offrent des situations de recherche qui répondent très bien à ces critères. La recherche à mener est suffisamment consistante, avec des prises d’initiative, mais aussi des perches tendues qui permettent aux élèves de rentrer dans le problème sans blocage.
Ces problèmes représentent ainsi une ressource très riche, qui peut être exploitée en classe, en modifiant bien sûr le protocole. Je relate ici un dispositif que je pratique de temps en temps en première S, très classique, mais bien adapté à ces problèmes :
- Les séances sont en demi-classe (encore faut-il pouvoir en disposer : module, AP)
- Les élèves travaillent en groupe de 3 sur tout ou partie d’un problème des olympiades. L’intérêt est évidemment qu’ils puissent confronter leurs réflexions et leurs tentatives, et constituer aussi une aide et une expérience favorable pour les élèves qui, s’ils étaient seuls, ne produiraient rien. Il y a aussi l’intérêt de devoir expliciter sa pensée à ses pairs. J’ai observé que, par 4, les groupes fonctionnaient souvent moins bien que par 3.
- Dans chaque groupe, un des élèves est désigné par le professeur comme étant le rapporteur. L’élève choisi est celui qui est susceptible de trop se reposer sur le travail des autres. Il est alors investi d’une mission qui l’oblige, non seulement à s’investir sur la recherche, mais aussi de s’approprier les éléments de réponses et de la manière de les obtenir. Il doit en avoir des traces écrites bien sûr.
- Le professeur peut s’autoriser à intervenir pour relancer un groupe qui piétine ou s’enlise, mais juste ce qu’il faut pour les faire repartir. Dans les annales des olympiades de 1res éditées par l’APMEP et téléchargeables sur son site (http://www.apmep.fr/-Olympiades ), les sujets sont suivis d’une annexe « Eléments de solutions », dont on peut éventuellement se servir pour choisir des coups de pouces si nécessaire.
- Après un temps donné (et annoncé au début de la recherche, en général 25 minutes), les rapporteurs doivent rendre compte des travaux de leur groupe. Il n’y a pas nécessité à ce qu’ils passent tous en revue ce qu’ils ont fait (cela évite les redites), mais chacun peut apporter des remarques, proposer des alternatives, contester ce qui est fait par un autre groupe. Si au début les rapporteurs ont la priorité de parole, les autres élèves peuvent ensuite intervenir pour les épauler.
- En fin de séance, on fait le bilan des différentes procédures ou variantes employées (démarches, raisonnements, calculs), et la liste des différentes connaissances et savoir-faire qui ont été mobilisés. Ce fit back final me semble très utile pour que les élèves réalisent qu’il y a un écart entre avoir des connaissances, et pouvoir les mobiliser dans des situations inédites.
En téléchargement (ci-dessous), deux exemples de sujet des Olympiades de 1re (un pour toutes les séries, un pour les 1reS), et deux exemples de problèmes des Olympiades de 4e choisis par Michel Suquet enseignant en collège.
On peut télécharger gratuitement toutes les Brochures des Olympiades de premières éditées par l’APMEP.
Tous les sujets nationaux des olympiades de 4e, 3e/2e et 1re sont disponibles sur le site Euler de l’académie de Versailles.
La Régionale Île-de-France APMEP, 26 rue Duméril, 75013 PARIS